Le monastère de Sainte Catherine (plus précisément Sainte Catherine d’Alexandrie) est niché dans le Sud de la péninsule du Sinaï, au pied du Mont Sinaï (Djebel Moussa en arabe, Har Sináy en hébreu) où il est dit que Moïse a reçu les Tables de la Loi, le Décalogue, le code formé par les 10 Commandements. Il a été construit sur le site où Moïse aurait vu le Buisson ardent, buisson qui brûla sans se consommer, symbole de l’apparition du Dieu éternel à Moïse.
Tout le Sinaï – le désert du Sinaï et la zone du monastère – est en réalité une région sacrée pour les trois grandes religions monothéistes dans le monde : christianisme, judaïsme et islam.
Le monastère de Sainte Catherine est le plus ancien monastère chrétien à avoir été habité en permanence par des moines : il a conservé sa fonction monastique sans interruption depuis sa fondation au 6e siècle et son histoire remonte à plus de 17 siècles ! C’est aujourd’hui un monastère grec orthodoxe. Il est un chef-d’œuvre architectural, riche des influences byzantine, islamique et européenne.
Faites un tour sur le site du monastère de Sainte Catherine, c’est magnifique !
À l’origine, l’Ordre monastique du Sinaï faisait partie de l’Église de Rome et fut reconnu en 1269 par le pape Innocent 4, mais en 1439, il se détacha de Rome pour suivre la liturgie de l’Église orthodoxe grecque. Les moines de Sainte Catherine suivent la règle de Saint Basile (lever à 2h30 le matin, prière et célébration de la messe de 4h à 7h30, vêpres de 14h à 17h suivies de l’unique repas de la journée).
Dans la liturgie, c’est la langue grecque qui est de vigueur, et la majorité des moines sont grecs. Ils forment en quelque sorte une Église autonome et indépendante, à la tête de laquelle un archevêque s’appuie sur un Conseil. Bien qu’ils aient été très nombreux entre le 10e et le 15e siècle (entre 300 et 400), les moines ne sont aujourd’hui plus qu’une vingtaine et sont aidés dans leur quotidien par des Bédouins de la tribu Djebeliah.
Une randonnée dans le Sinaï vous mène certainement au monastère de Sainte Catherine.

Il se situe à 1570 mètres d’altitude, à l’extrémité du wadi el-Deir (vallée du monastère), aussi appelé Wadi Shoeid (vallée de l’Horeb) ou Wadi Jethro (du nom du beau-père de Moïse). L’entrée de ce Wadi el-Deir est reconnaissable à une petite colline isolée au sommet de laquelle s’élèvent un mausolée et une chapelle : le mausolée de Sheikh Harun et la chapelle du Veau d’Or.
Dans le récit biblique, au cours de l’Exode du peuple hébreu depuis l’Égypte vers la terre promise, alors que Moïse gravit le Mont Sinaï au sommet duquel il va recevoir les Tables de la Loi, les Hébreux, libérés du joug du Pharaon, demandent à Aaron de leur désigner un dieu pour les guider. Aaron commande alors au peuple hébreu de briser les boucles d’oreilles en or des femmes et des enfants, et de fondre un veau qu’ils désignent et adorent comme dieu.
Quand Moïse descend du Mont Sinaï et qu’il voit les Hébreux adorer le Veau d’Or (adorer une idole est interdit par le Deuxième Commandement), il est pris d’une telle colère qu’il fracasse les Tables de la Loi sur un rocher. Il doit alors retourner au sommet du Mont Sinaï pour regraver les tables afin de conclure le pacte d’alliance entre le peuple israélite et Dieu.

Quatre massifs montagneux veillent sur le monastère de Sainte Catherine : Djebel el-Deir (montagne du monastère), Djebel Moussa (montagne de Moïse, que vous pouvez gravir lors d’une randonnée dans le Sinaï), Djebel Moneiga et Râs Safsafa (le sommet des Saules) dont les 3 pitons culminent dans le ciel. Au sommet du plus haut piton, une croix a été construite pour désigner le lieu où Moïse montra les Tables de la Loi au peuple réuni dans les plaines d’el-Raha (plaine du repos) et d’el-Melga.
Le village de Sainte Catherine, peuplé par les Bédouins de la tribu Djebeliah, est construit dans la plaine d’el-Raha, là où les Hébreux, après 50 jours d’errance, campèrent, au pied de la montagne sacrée, la montagne d’Horeb, appelée ensuite Djebel Moussa.
Les premiers chrétiens virent en Djebel Moussa la montagne sacrée par excellence et des petites communautés de moines s’installèrent progressivement, mais ce ne fut qu’en 330 qu’Hélène, mère de l’empereur Constantin, fit construire une petite église sur le site où Moïse avait vu le Buisson ardent (aujourd’hui appelée Chapelle du Buisson ardent, située dans l’enceinte du monastère de Sainte Catherine, mais qui n’est pas accessible aux visiteurs). La communauté monastique n’eut de cesse de se développer et c’est en 527 que l’empereur Justinien ordonna la construction d’un véritable monastère.
Le monastère de Sainte Catherine fut donc fondé par l’empereur Justinien entre 527 et 547.
Entouré d’une grande muraille de granit rose pour se protéger des attaques des Bédouins, le monastère se composait à l’époque d’une Basilique, la Basilique Sainte-Hélène, qui deviendra la Basilique de la Transfiguration après qu’elle fut décorée de la somptueuse mosaïque de la Transfiguration. L’empereur fit venir des familles originaires de Valachie (sud de l’actuel Roumanie), de Bosnie et d’Alexandrie pour servir et protéger les moines : les Bédouins Djebeliah (Djebeliah veut dire « ceux de la montagne »), qui vous guident lors d’une randonnée dans le Sinaï, en sont les descendants, convertis à l’Islam.

À partir de 640, avec la conquête musulmane de l’Égypte, le désert du Sinaï devint une voie de passage du califat arabe. Les Égyptiens chrétiens (les Coptes) opposèrent peu de résistance et la religion musulmane (et la langue arabe remplacèrent progressivement le christianisme et la langue copte, mais les moines du monastère, protégés par un édit de Mahomet qui les prenait sous sa protection, continuèrent de vivre et faire vivre le monastère de Sainte Catherine.
Les pèlerins se firent néanmoins plus rares et il fallut attendre le 11e siècle, à l’époque des Croisades, pour que le culte de Sainte Catherine se propage en Europe. C’est alors que le monastère devint, avec Compostelle, Jérusalem et Rome l’un des plus hauts lieux de pèlerinage de la Chrétienté.
Initialement sous le patronage de Théotokos, la Mère de Dieu, puis de la Transfiguration, le monastère de Sainte Catherine fut après l’an mille sous le patronage de Sainte Catherine d’Alexandrie. En effet, entre le 7e et le 9e siècle, les moines retrouvèrent le corps de Sainte Catherine, qui, selon la légende, aurait été transporté par les Anges au sommet de la montagne Sainte Catherine, après qu’elle eut été assassinée par l’Empereur Maximin. Ils ramenèrent le corps dans la Basilique de la Transfiguration et les moines du monastère de Sainte Catherine devinrent les gardiens des reliques de la Sainte : le monastère prit alors le nom de monastère de Sainte Catherine.
Le martyr de Sainte Catherine
Catherine d’Alexandrie est née dans une famille noble d’Alexandrie (en Égypte) en 290. Dotée d’une excellente éducation, elle prit rapidement place parmi les plus grands poètes et philosophes de son époque.
Décrite comme vaniteuse et d’une grande beauté, elle aurait dit à sa mère qu’elle n’épouserait qu’un homme supérieur à elle en intelligence, beauté et condition sociale !
Sa mère décida alors de l’envoyer chez un ermite chrétien afin qu’elle rencontre le Seigneur. L’ermite lui fit cadeau d’une icône de la Sainte Vierge Marie, et lui dit qu’elle allait bientôt rencontrer celui qui deviendrait son époux. La nuit suivante, la Mère de Dieu et son Fils apparurent à Sainte Catherine : le Fils se détourna de Catherine lui disant qu’elle n’était ni belle, ni intelligente, ni de noble condition car non baptisée dans le Christ. Dès le lendemain, Catherine se convertit au christianisme et demanda à être baptisée.
Selon la légende, le Christ apparut une seconde fois à Catherine et lui donna un anneau, symbole de leur union mystique.
En 313, à l’occasion de jeux organisés en l’honneur de l’Empereur Maximin à Alexandrie, des chrétiens devaient périr brûlés vifs. Catherine se présenta devant l’Empereur et tenta de le convertir au christianisme. Mais Maximim la mit à l’épreuve et organisa un débat avec 50 des plus grands philosophes de l’Empire.
À l’issue du débat, ces derniers se convertirent tous au christianisme. Fou de rage, l’Empereur Maximin les condamna à être brûlés vifs, mais séduit par l’intelligence de Catherine, il lui demanda de devenir son épouse. Celle-ci refusa : il la fit déshabiller, flageller et jeter en prison, sans nourriture. Lors d’une visite de l’Impératrice et du chef de la garde à Catherine, ils trouvèrent la cellule emplie de lumière, des anges soignant Catherine et une colombe la nourrissant. L’Impératrice, le chef de la garde et 200 soldats se convertirent de suite à la foi chrétienne.
Furieux de nouveau, et constatant que Catherine était en parfaite santé, l’Empereur Maximin fît construire une roue dotée de pointes de fer dans le but de la torturer. Selon la légende, les roues se brisèrent. L’Impératrice accusa son mari de cruauté et lui appris sa conversion, ainsi que celle du chef de la garde et des 200 soldats : Maximin les fît tous décapiter. Catherine, refusant une seconde fois de devenir la femme de l’Empereur, fut condamnée par Maximim et mourut décapitée le 25 novembre. L’histoire de Catherine d’Alexandrie peut être lue sur le site du monastère de Sainte Catherine : cliquez ici

Après la conquête ottomane de l’Égypte et du Sinaï par le sultan Selim 1er en 1517, les moines du monastère furent protégés par un édit du sultan et l’influence du monastère de Sainte Catherine ne cessa de croître : il essaima en l’Égypte bien sûr, en Palestine, mais bien au-delà aussi : en Crète, en Russie, en Roumanie…
Le monastère de Sainte Catherine fut agrandi plusieurs fois, les murs parfois reconstruits ou restaurés. C’est par exemple le cas du mur nord, où se trouve l’entrée actuelle du monastère : Diwar Duawara (mur du Précipice), fut reconstruit en 1312 et restauré en 1800, sur ordre de Bonaparte (alors en expédition en Égypte), qui fit ajouter une tour carrée, une tour d’angle et un bastion central. Bonaparte en profita pour promulguer un édit de protection du monastère.

On peut aussi remarquer que les murs d’enceinte ont des hauteurs et des longueurs différentes selon les endroits, afin de s’adapter à typologie de la montagne qui les borde : entre 74 et 84 mètres de longueur, de 9 à 15 mètres de hauteur et parfois plus de 2 mètres d’épaisseur !

À l’origine, l’accès au monastère de Sainte Catherine se faisait par le mur Ouest, mais l’entrée est désormais côté Nord.
Les portes du monastère de Sainte Catherine ne s’ouvraient qu’exceptionnellement. Les échanges entre l’intérieur et l’extérieur du monastère se faisaient par des paniers accrochés à des cordes qu’un moine faisait monter et descendre grâce à des poulies depuis une petite guérite en bois construite en hauteur, qui surplombait le vide. Il y eut même un temps où les portes du monastère ne s’ouvraient jamais, et où les pèlerins accédaient au monastère de Sainte Catherine… en montant dans les paniers !
Dès l’entrée du monastère, à droite, se trouve le puits de Jethro ou fontaine de Moïse : selon la Bible, c’est là que Moïse sauva de l’assaut de bergers violents les 7 filles de Jethro, prophète des Madianites, un peuple nomade auprès duquel Moïse trouva refuge lorsqu’il s’exila 40 années durant après avoir tué un Égyptien qui maltraitait un Hébreu. Pour le remercier, Jethro lui accorda l’aînée d’entre elles comme épouse : Séphora (ou Tsipora), qui veut dire petit oiseau. C’est la source qui aujourd’hui encore fournit le monastère de Sainte Catherine en eau.

C’est juste en face du puits que la Basilique de la Transfiguration a été construite en 527. Une magnifique porte en bois gravée (où l’on peut lire, écrit en grec, « Voici la Porte du Seigneur, les justes pourront y entrer ») du 11e ou 12e siècle, mène à un narthex (un portique en bois qui précède l’entrée de la Basilique et qui abrite quelques très belles icônes exposées sous verre, puis l’accès à la Basilique se fait par une porte en bois à 4 battants, datée du 6e siècle.

La Basilique du monastère de Sainte Catherine est composée de 3 nefs, séparées par 12 colonnes, et est décorée par une profusion de grands lustres, d’icônes immensément précieuses, d’œuvres et objets religieux somptueux, le tout dominé par une édifiante iconostase en bois du 17e siècle effectué par le moine crétois Jérémie le Sinaïtique, représentant le Christ, la Vierge, Sainte Catherine, Saint Nicolas, Saint Michel, Saint Jean-Baptiste et les grandes fêtes liturgiques.
C’est au-dessus du chœur, à l’ombre des grands lustres, que se trouve la célèbre mosaïque de la Transfiguration, et à droite du chœur, invisible aux regards, est déposé le sarcophage en marbre où repose le corps de Sainte Catherine. Le clocher aux 9 cloches a été construit en 1871 par le moine Basile.

La mosquée et son minaret font face à la Basilique. Construite en 1106, à partir d’une chapelle dédiée à Saint Basile, la mosquée abrite un minbar en bois (pupitre où l’Imam prêche le vendredi) du 12e siècle, unique minbar de l’époque fatimide (dynastie chiite ismaélienne qui régna en Afrique du Nord-Est puis en Égypte, de 909 à 1171) connu au monde.
La Chapelle du Buisson ardent fut construite au lieu même où Moïse vit le Buisson brûler sans se consumer : son Autel est édifié sur les racines du Buisson ardent. Au 6e siècle, le Buisson ardent fut déplacé à l’extérieur de la Chapelle, là où il est possible de le voir encore aujourd’hui. Ce Buisson est un spécimen rare de Rubus Sanctus, une plante ligneuse que l’on trouve en Crète, en Israël, et en Égypte, uniquement au Sinaï.

La bibliothèque du monastère de Sainte Catherine, qui réunit une grande variété de textes religieux chrétiens, est considérée comme la 2e au monde, après celle du Vatican : un lieu d’une richesse inestimable de par sa collection de quelques 3400 manuscrits accumulés durant un millénaire et demi, codex et manuscrits anciens.
Les plus anciens manuscrits de cette collection datent du 3e siècle. La bibliothèque, avec l’ensemble du site du monastère de Sainte Catherine, est inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 2002, dans le cadre de la zone Sainte Catherine.
Elle a été entièrement rénovée afin de conserver les manuscrits dans des conditions optimales : cliquez ici.
Nous vous conseillons de regarder la vidéo « The Ancient Manuscripts of Egypt’s Sinai Monastery » : cliquez ici.
Parmi les trésors de la bibliothèque du monastère de Sainte Catherine, il y a les premières bibles, de la poésie religieuse et de la musique d’église, des écrits des différents Pères de l’Église, de la littérature monastique…
Des textes écrits pour la plupart en grec, mais aussi en arabe, syriaque, géorgien, et en langues mortes, comme l’araméen palestinien chrétien ou l’albanais du Caucase… écrits ou copiés par les moines. C’est dans la bibliothèque du monastère de Sainte Catherine que fut découvert en 1844 le célèbre Codex Sinaïticus, composé de 129 feuilles de parchemin, qui contient une Bible du 4e siècle (l’un des plus anciens manuscrits de la Bible en grec). Aujourd’hui ce codex est en partie conservé au monastère de Sainte Catherine, les autres parties se trouvant à la British Library à Londres, la Bibliothèque universitaire de Leipzig en Allemagne et la Bibliothèque nationale de Russie à Saint-Pétersbourg.
Une vaste collection de codex et manuscrits conservée au monastère de Sainte-Catherine a été numérisée et est désormais disponible dans le catalogue en ligne de la Bibliothèque nationale d’Israël. Nous vous recommandons à ce sujet la lecture de l’article « La collection d’une des plus anciennes bibliothèques du monde numérisée » du journal en ligne ActuaLitté : cliquez ici.
Vidéo (courte) sur le monastère de Sainte Catherine : cliquez ici.
Annexée à la bibliothèque, la Galerie des Icônes regroupe plus de 2000 icônes, peintes sur bois par les moines du monastère de Sainte Catherine, principalement entre le 6e et le 15e siècle.
Les icônes byzantines constituent sans doute le trésor le plus remarquable du monastère de Sainte Catherine. Parmi les plus prestigieuses, se trouve l’Échelle de l’ascension divine datée du 11e ou 12e siècle, représentant Saint Jean du Sinaï, moine du 6e siècle qui a mené une vie d’ascète dans le désert du Sinaï et a été abbé du monastère de Sainte Catherine. Il est considéré comme l’un des principaux maîtres de la vie spirituelle chrétienne et comme une figure emblématique de la tradition monastique de l’Orient et de l’Occident.
Les trente échelons de l’échelle symbolisent les vertus décrites par Saint Jean du Sinaï dans son traité d’ascèse et de théologie intitulé Klimax – L’Échelle de l’ascension divine. La scène est divisée en deux parties égales. À gauche, les moines gravissant les échelons du chemin ascétique se dirigent vers le Christ et la grâce de l’amour divin. À droite de la composition, les moines qui n’ont pas persévéré dans l’ascèse sont précipités dans le vide par des démons, symboles des vices. Au sommet de l’échelle, Saint Jean du Sinaï lui-même est accueilli par le Christ. L’archevêque Antonios, qui fut sans doute son successeur à la tête du monastère de Sainte Catherine, le suit, quelques échelons plus bas.

Les images qui mettent en avant le Buisson ardent ont évidemment une tonalité particulière au Sinaï puisqu’elles évoquent le site sur lequel fut construit le monastère de Sainte Catherine.
L’icône Moïse devant le Buisson ardent, datée de la fin du 12e siècle ou début du 13e siècle est la représentation du jeune Moïse qui pose son pied gauche sur une roche du Mont Horeb et délie sa sandale devant le Buisson ardent (selon l’Exode 3:2 ; symboliquement, à l’image de Moïse déliant ses sandales, Dieu souhaite délier son peuple de la servitude). Regardez dans le coin inférieur gauche du cadre : le donateur de l’icône est représenté accroupi dans une attitude de supplication. On ne sait pas si le turban qu’il porte indique son origine, mais on sait que Moïse fait l’objet chez les Musulmans d’un respect particulier.

Le Buste de Christ Pantocrator, datant du 6e siècle. La qualité exceptionnelle de cette icône incite à penser qu’elle fut produite à Constantinople, peut-être durant le règne de Justinien (fondateur du Monastère de Sainte Catherine) et peut-être envoyée comme cadeau royal au Monastère de Sainte Catherine par l’Empereur.

À l’extérieur de l’enceinte de l’Empereur Justinien, se trouvent le jardin (véritable oasis de montagne, entourée de cyprès, où poussent des oliviers, amandiers…) et un potager, le cimetière, la chapelle dédiée à Saint Triphonion, dont la crypte abrite les ossements des moines du monastère de Sainte Catherine (par manque de place, les corps des moines sont exhumés au bout d’un certain temps).
Seule une toute petite partie du monastère de Sainte Catherine est accessible aux visiteurs : le narthex et l’entrée de la Basilique, et on accède au puits de Jethro et au lieu où se trouve désormais le buisson ardent, protégé par un petit muret. En revanche, le musée du monastère de Sainte Catherine est d’une beauté, d’une sobriété, et d’une richesse inestimables. Il faut absolument y entrer, vous ne pourrez qu’être saisi !
Visite virtuelle du musée : cliquez ici.
Si vous souhaitez regarder des vidéos sur le monastère de Sainte Catherine (en anglais) :
Greek-Orthodox: Monastery Of St.Catherine, Sinai (Egypt) : cliquez ici
The Monastery of St. Catherine – Sinai, Egypt : cliquez ici
The Conservation of the Mosaic of the Transfiguration in the Monastery of Saint Catherine Sinaï : cliquez ici
Pierre Loti, écrivain, officier de marine et explorateur né en 1850 et mort en 1923 entreprit en 1894 un voyage dans le Sinaï. Il consigna ses impressions de voyage dans le livre Le Désert. Il est sans doute l’un des auteurs qui livre une description la plus exacte et la plus intéressante du monastère de Sainte Catherine.
Voici un (long !) passage du livre Le Désert, dédié à la Basilique de la Transfiguration du monastère de Sainte Catherine :
(…) Au fond d’un creux où nous sommes descendus, voici enfin la basilique. On ouvre devant nous les deux battants d’une porte de cèdre, qui fut sculptée il y a treize cents ans, – et nous entrons dans les étonnements de ce lieu, unique au monde, que sa situation au désert a préservé des révolutions, des pillages, de toutes les retouches humaines, et qui est à peu près demeuré tel que le fit construire, en l’an 550, l’empereur Justinien.
La vue, au premier instant, est éblouie et déconcertée par la profusion des lustres, des lampes d’argent qui descendent d’en haut, formant, au-dessus des parquets de mosaïques, une sorte de seconde voûte suspendue, compliquée, étincelante. (…)
Les murs sont couverts de peintures et de dorures byzantines, de mosaïques de marbre, de vieilles broderies éteintes et de vieux brocarts mourants. Tout le fond de l’église est d’un byzantin presque arabe, surchargé naïvement, et le voile qui, suivant le rite grec, masque le tabernacle, est fait d’une de ces merveilleuses étoffes persanes lamées dont s’habillaient les sultans d’autrefois.
Par une petite porte latérale toute basse, nous pénétrons, derrière ce voile fermé, dans le lieu plus surprenant encore où le tabernacle se tient. Ici, la voûte est de mosaïque d’or, comme à Sainte-Sophie, mais intacte, relique sans prix, qu’a préservée le désert d’alentour. Le tabernacle, les chaises pour les évêques, sont en fines marqueteries de marbre ; les étoffes, de style à peu près inconnu, ont d’inimitables broderies fanées.
Il y a deux châsses, jadis offertes par la Russie pour sainte Catherine, qui sont entièrement en argent repoussé et gravé ; sur chacune d’elles, la sainte, en vêtements d’or rehaussés de turquoises, de rubis et d’émeraudes, est couchée, la tête sur un oreiller d’argent dont les ciselures patientes et merveilleuses imitent la trame des vieux lampas. – On comprend qu’il faille de puissantes murailles pour protéger de tels trésors. – À profusion, sont accrochées, aux parois de marbre, les icônes d’argent, d’or et de pierres précieuses. Et, sur des pupitres, sont posés des évangiles, manuscrits sur parchemin qui ont mille ou douze cents ans, reliés de pierreries et d’or…
Derrière le tabernacle est le lieu sacré par excellence, la crypte du « Buisson ardent », où l’un des moines nous conduit par des petites portes encore plus basses, au milieu d’une pénombre de caverne. Dans une sorte de vestibule où les vieux tapis d’Orient ont des épaisseurs de velours, il nous arrête, avant de nous laisser entrer, pour nous faire quitter nos babouches : par obéissance au commandement de l’Exode, on ne pénètre que pieds nus dans ce sanctuaire profond. Et enfin, le seuil franchi, nous nous trouvons en plein 6e siècle, dans les naïves merveilles des vieux temps morts.
Le lieu est sombre, entièrement revêtu de faïences antiques d’un bleu vert ou de mosaïques d’or, lesquelles disparaissent sous les icônes d’or et de pierreries accrochées au mur, sous la profusion des lampes d’argent et d’or qui descendent du plafond bas. Des Saintes rigides, en robes de vermeil, dont le visage reste dans un effacement sombre sous leurs barbares couronnes étincelantes, nous regardent entrer. (…)
Une sorte de loge, qui est pavée d’argent ciselé et où des lampes brûlent, occupe le fond de la crypte : c’est là que, d’après la tradition vénérée, l’ange de l’Éternel apparut à Moïse, du milieu du buisson en flamme. (…)
Il y a des bibliothèques aussi, grandes au plus comme des cabines de navire, mais ne contenant que d’uniques et introuvables œuvres. Celle-ci, remplie de manuscrits syriaques ; celle-là, de manuscrits grecs contemporains de Byzance, vieux parchemins sans prix, enluminés patiemment dans le silence des palais ou des cloîtres, livres écrits de la propre main de saint Basile ou de saint Chrysostome, évangiles calligraphiés par l’empereur Théodose… Et la poussière les ronge de siècle en siècle ; et la neige des hivers, qui fond sur les toits, y dessine des taches noires, en suintant – comme aujourd’hui – à travers la pourriture des plafonds. (…)
Un peu plus loin, dans ce même livre Le Désert, Pierre Loti évoque la distribution de nourriture, dans les guérites équipées de cordes, de poulies et de paniers, par les moines du monastère de Sainte Catherine aux Bédouins :
(…) La vue plonge de là-haut sur des précipices de granit rouge, au fond desquels, dans l’ombre froide, sont attroupés une centaine de Bédouins en haillons noirâtres, affamés venus des lointains du désert : c’est que tout à l’heure va se faire la distribution de pain, qui a lieu trois fois par semaine.
Jamais, jamais les moines ne laissent un Bédouin franchir les portes étroites du couvent, de peur, sans doute, qu’il n’en aperçoive les richesses. Mais deux frères d’ordre inférieur se tiennent dans l’une des guérites avancées qui surplombent les précipices – et qui jadis, au temps où les portes ne devaient jamais s’ouvrir, servaient à hisser les pèlerins dans des paniers -.
Ces frères, quand l’heure des aumônes est venue, font descendre une corde, qui court dans une poulie ; les Bédouins alors se précipitent, y attachent chacun un vêtement, et on remonte aussitôt ce paquet énorme de guenilles.
Puis un des moines, prenant au hasard une loque, l’agite au-dessus de l’abîme, en demandant :
– À qui ce burnous ?
– À moi ! répond une voix d’en bas.
– Combien êtes-vous dans la famille ?
– Sept !
On enveloppe sept pains noirs dans le burnous, et de trente pieds de haut, on le rejette au-dehors… Ainsi de suite, jusqu’au dernier. (…)